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Arkantz - Blog humaniste & républicain de vigilance
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5 juin 2007

L’indépendance est-elle un leurre ?

Etre indépendant. Qui n’a pas caressé ce rêve ? Se libérer des tutelles comme des contraintes. Bref, décider de tout sans rendre le moindre compte à personne. Et, si l’indépendance n’était justement qu’un rêve, une utopie.

Ce sont avant tout les hommes et les peuples qui aspirent à devenir indépendants pour se libérer des chaînes de la servitude, de l’esclavage ou de la colonisation ; ce sont les adolescents qui, rejetant l’autorité parentale, veulent vivre de leurs propres ailes, selon leurs propres codes ou leurs envies.

Mais à vrai dire cette indépendance-là existe-t-elle vraiment ? Et surtout devient on réellement indépendant isolément. L’indépendance est avant tout un concept, une idée qui s’appuie sur celle de liberté. Toute liberté individuelle ou collective n’est que relative puisque limitée par la liberté des autres. Les autres nous renvoient au principe que nous ne sommes pas seuls, que nous devons composer et nous adapter. Ce qui revient à dire que l’indépendance elle-même est une notion relative.

Les peuples issus de l’éclatement des empires en 1918 ou de la décolonisation des années 60 n’en ont-ils pas fait les frais.

En 1990, après l’implosion de l’Union soviétique, les anciennes républiques de l’Union proclamèrent leur indépendance. Il faut croire qu’elles avaient hâte de se démarquer de l’ancien système et de ses sept décennies de dirigisme parfois autoritaire. Leurs dirigeants, pourtant issus de ce système, imaginaient-ils alors que cette indépendance n’était qu’une vue de l’esprit ; et que leurs jeunes États pour beaucoup sans réelle expérience démocratique, figés dans le carcan d’un système centralisé, dépendaient encore les uns des autres. Ainsi, la Russie proposa à ses républiques satellites une nouvelle structure, la Communauté des États Indépendants (CEI).

Au 18ème siècle, des économistes que l’on surnomma les physiocrates prêchaient le « laisser-faire laisser-aller » et rejetaient tout interventionnisme. Ils avaient sans doute compris que toute action isolée a une incidence globale que ce soit dans la société ou dans l’économie dans son ensemble. Ils venaient de mettre en avant le principe d’interdépendance. L’interdépendance n’est pas un principe nouveau. Il est l’un des fondements du bouddhisme.

Cette interdépendance, les anciennes républiques soviétiques l’ont découverte parfois à leur dépens. Elle est pourtant la règle dans tout corps social ou physique. Ce qui n’empêche pas d’afficher à tout prix son indépendance. Quel homme politique n’a pas clamé son indépendance vis-à-vis de son parti ou de sa famille politique. Est-il vraiment aussi indépendant qu’il le prétend ? Certains diront de lui qu’il est un franc-tireur. Ce terme vient du vocabulaire militaire. Le franc-tireur lui même est celui qui ne dépendant plus d’aucune unité militaire reconnue a choisi de poursuivre le combat de son propre chef. La Résistance française a même eu ses Francs-Tireurs Partisans. Peut-on être à la fois Francs-Tireurs et Partisans, le premier étant à proprement parler détaché de toute autorité, le second affilié à un parti. Il faut croire que le combat solitaire est voué à l’échec, et qu’on ne peut rien concevoir autrement qu’en groupe. Ce qui est vrai dans le monde militaire, ne le serait-il pas dans la politique ou dans la société ?

Toute proportion gardée, la CEI ne s’inspire-t-elle pas de la CECA. En 1954, six États européens, la France et l’Allemagne réconciliées, l’Italie et les trois États du Benelux, décidèrent de fonder la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier. Le charbon et l’acier ne devaient-ils pas être le creuset d’une Union solide. Or il n’était en question alors que de communauté pas encore d’Union.

L’idée d’Union devait intervenir plus tard. La CECA devint la CEE et cette dernière s’effaça devant l’Union Européenne. C’est aujourd’hui pourtant une Union plus communautaire qu’unioniste. Union ou communauté, le principe qui la sous-tend est celle d’interdépendance. C’est parce qu’ils se savaient interdépendants que les signataires du traité de Rome jetèrent les bases de la Communauté Européenne. L’Europe n’est d’ailleurs pas un exemple isolé. Chaque continent, chaque zone géographique, chaque mouvement religieux, culturel ou philosophique a sa propre organisation.

Alors pourquoi vouloir à tout prix montrer son indépendance ? Dans le politiquement correct, ne serait-ce pas une élégance intellectuelle. Serait-ce une fragilité que d’avouer son interdépendance ? On aime cacher ses faiblesses et affirmer ses forces. Néanmoins, peut-on considérer l’indépendance comme une force et l’interdépendance comme une faiblesse.

Et si l’indépendance n’était qu’un leurre, un miroir aux alouettes nécessaire que les politiques utilisent pour rassurer le peuple. La liberté, l’indépendance ne doivent pas faire oublier que sans la responsabilité elles ne sont rien.

« Chacun est responsable de tous », écrivait Saint-Exupéry dans Pilote de guerre. Ce qui est vrai dans le ciel le reste sur terre.

Carl E. ARKANTZ

12 novembre 2006

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  • Arkantz est mon nom de plume. S'il commence par A et finit par Z, ce n'est pas un hasard mais un hommage à un artiste auquel je suis apparenté. Consultant-formateur engagé, je m'inscris dans une vision laïque, humaniste et écologiste de la société.
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