"Histoire de la Turquie contemporaine" de Hamit Bozarslan, éditions La Découverte, page 41
"Il en allait de même pour les Juifs qui, comme le montrent de nouvelles recherches, notamment celle de Rifat Bali en turc, furent définis comme une "menace" et devinrent la cible, dès 1923, de mesures drastiques, impliquant l'interdiction de leur libre circulation en Anatolie. La presse, mais aussi les responsables kémalistes eurent régulièrement recours aux discours antisémites. Au début des années 1930, les juifs, (comme les Arméniens et les Grecs d'ailleurs) perdirent leurs emplois dans le service public et dans les municipalités (la presse qui évoquait ces licenciements précisait que ces postes allaient désormais être réservés aux seuls musulmans).
La montée de l'antisémitisme en Europe dégrada encore la situation de la communauté juive.
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En 1934,en effet, une campagne antisémite violent fut lancée contre les "Juifs qui refusent de parler le turc", à Izmir et en Thrace (Edirne, Çanakkale, Uzunköprü, Kirklareli...). Le gouvernement laissa les instigateurs, notamment Cevat Rifat Atilhan et Nihal Adsiz, tous deux grands admirateurs de Hitler, agir en toute impunité, mais décida, pour des raisons de "sécurité nationale" et pour les "protéger", d'expulser en masse les juifs de Thrace. Les campagnes antisémites qui émergèrent épisodiquement ne cessèrent qu'en 1944."
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Hamit Bozarslan, est né le 11 octobre 1958, à Lice en Turquie. Il est maître de conférences à l'EHESS. Après des études d'histoire, il a obtenu le doctorat de l'EHESS («Courants d'idée dans l'Empire ottoman, 1908-1918», thèse dirigée par Fr. Furet) et celui de l'IEP de Paris («états et minorités au Moyen-Orient : La régionalisation de la question kurde», thèse dirigée par R. Leveau). Ancien allocataire de recherche au Centre Marc Bloch à Berlin et à l'Université de Princeton, il travaille actuellement sur la violence au Moyen-Orient.