Derrick… Du policier préféré des retraités
À la retraite de Russie du grenadier oublié
Avec sa coiffure grisonnante impeccablement gominée, son sourire carnassier et ses costumes élégants, Derrick séduisait par sa nonchalance alliée à une assurance naturelle qui faisait de cette série l’une des préférées des retraités. Interprété par Horst Tappert, l’inspecteur Derrick avait en effet cette façon particulière de reformuler les questions lors des interrogatoires. Cette répétition bienvenue (merci au doublage) permettait de bien comprendre l’enquête.
Tout comme le générique des Humphries composé sur deux rythmes opposés dynamique en premier puis bien plus pantouflard ensuite, Derrick combinait un côté « Maigret » avec quelques moments d’action dignes du commissaire Moulin (première saison).
Derrick maniait l’alternance et l’ambiguïté avec une part d’ombre et de lumière. Un temps, la presse dévoilait que son fils aurait eu des démêlés avec la justice. Dans ses mémoires, publiées en 1999, le comédien (décédé en 2008) parlait sobrement de son passé dans la Wehrmacht. Il y a quelques jours le Frankfurter Allgemeine Zeitung reprenait une information du sociologue Jorg Becker sur l’appartenance de Horst Tappert à la Waffen-SS.
Envoyé sur le front russe, il aurait servi dans une division blindée comme Panzergrenadier (infanterie SS chargée d’accompagner les chars de combat) et aurait même participé à la bataille de Koursk. Il est toujours délicat de parler de cette période trouble de l’histoire allemande. Des recherches personnelles sur Julius Ritter, abattu en novembre 1943 à Paris par les commandos de la première section de l'Armée secrète devenue célèbre grâce à l’Affiche rouge, ont montré la difficulté de la recherche de la vérité sur les dignitaires nazis. Qui pouvait être réellement Julius Ritter pour qu’Adolf Hitler en personne décrète un deuil national de trois jours après son assassinat ? Un simple responsable du STO ? Ou alors un dignitaire nazi de très haut rang fréquentant les arcanes du pouvoir à Berlin ? Les informations sont inexistantes, contradictoires ou parcellaires.
Comme beaucoup de jeunes Allemands, parfois des adolescents, Horst Tappert a pu être séduit par une idéologie dominante ou n’a-t-il pas pu céder à une pression sociale et politique. Il est vrai que le choix de la Waffen-SS, s’il est avéré pourrait plutôt pencher vers le choix volontaire que la simple soumission. Josef Ratzinger, en son temps, avait connu cette même suspicion sur son passé « nazi » lorsqu’il devint Benoît XVI. Il est difficile de juger d’une période et les hommes qui l’ont vécue sans se remettre soi-même en question. Quels auraient été nos propres choix dans la même situation ? Qui peut vraiment y répondre sans se tromper ?
Néanmoins la question fondamentale est : Maintenant que Horst Tappert est mort, quel est l'intérêt de faire ressortir cette histoire ?