Exploitation médiatique
Ou réveil tardif des consciences
Station balnéaire sur la mer Egée, Bodrum (l’ancienne Halicarnasse) se serait bien passé d’une telle publicité. L’image du corps d’Aylan Kurdi, un enfant kurde de Syrie mort noyé à 3 ans sur une de ses plages aura fait le tour du monde en un buzz médiatique.
Cette mort aussi atroce soit-elle ne doit pas faire oublier l’indifférence coupable de ceux-là mêmes qui se disent choqués aujourd’hui alors que la guerre sévit en Syrie et en Irak. Depuis l’intervention militaire américaine de 2003, l’Irak est déchiré entre ses factions ethniques et religieuses. Les sunnites au pouvoir sous le régime Ba’assiste de Saddam Hussein, minoritaires ont été mis à l’écart, chassés de l’armée et des institutions au profit d’un gouvernement incapable de gérer la crise politique, le séparatisme des Kurdes et le terrorisme sur son territoire.
Rares sont ceux qui pleureront la chute de Saddam Hussein, hormis peut-être les chrétiens d’Irak qui étaient protégés par le parti Ba’as et le système politique d’alors. La leçon à tirer après ces 12 années d’instabilité est que la « démocratie » voulue par Washington et ses alliés ne s’exporte ni ne s’impose par la force. Et il ne sera pas inutile que les apprentis-sorciers bellicistes se replongent dans « l’Art de la guerre » de Sun Tzu avant de se prendre pour de grands stratèges, à moins que leur calcul soit d’entretenir le chaos pour continuer à exploiter la misère de leurs victimes.
Après l’Irak, il fallait se débarrasser du régime syrien et de l’encombrant héritier de Hafez E-Assad, son fils Bachar. Le « printemps arabe » commencé en Tunisie en aura été l’opportunité par une contagion d’ouest en est, balayant la Libye puis l’Egypte dans son courant intégriste dévastateur. Mais après quatre ans de guerre civile, le président syrien est toujours en place, malgré la diabolisation mis en scène par les médias et les pseudo-experts du Moyen-Orient, distillant leur propagande sur les ondes et le Net.
L’hypocrisie de l’Occident et de ses alliés locaux comme leur duplicité ne fait pas le moindre doute. Seuls ceux qui n’ont pas envie de le voir ou de l’entendre croient encore ce qu’on essaye de nous faire avaler. Saddam Hussein n’était pas un individu fréquentable ou respectable selon de nombreux points de vue, ses successeurs le sont-ils vraiment ? Bachar El-Assad ne l’est pas non plus. Mais peut-on prétendre que nos dirigeants occidentaux le soient eux aussi ?
La mort d’un enfant est atroce. De nombreux enfants ont été violés et tués en Syrie et en Irak. Quelle a été la réaction de nos médias, de notre opinion publique, de nos dirigeants si prompts à s’offusquer ? Le silence ! Même la RATP avait interdit à l’affichage la publicité d’un concert des Prêtres pour le soutien des Chrétiens d’Orient au nom de la laïcité. La mort est atroce quelles qu’en soient les victimes, son exploitation est plus atroce encore.