Urgence en État... permanent
Ou lorsque le provisoire perdure
À la BBC, le premier ministre Manuel Valls aurait annoncé que l'état d'urgence serait maintenu jusqu'à ce que Daech soit vaincu.
La fin de l'état d'urgence serait donc liée à la réalisation d'un événement qu'aujourd'hui personne ne peut connaître ni prédire. Le plus inquiétant est qu'une grande partie de la population se satisfasse de cette situation. Inquiétant à plus d'un titre, en effet la mise en place de l'état d'urgence n'a pas démontré son efficacité. Au regard des manipulations qui, au cours de l'histoire, ont servi de prétexte au recours à des mesures liberticides, ces black ops ou false flag utilisées par les services secrets afin de créer une psychose généralisée, ne nous laissons pas guider par nos instincts grégaires en applaudissant à la mise à mort de nos libertés sous l'alibi de la sécurité.
Si un nouvel attentat intervient, pourra-t-on encore croire que le choix du politique a porté ses fruits ? Tant qu'on prétendra que les actions entreprises ont eu un réel impact alors que le Conseil d’État vient d'annuler une des rares assignations à résidence, que dire de l'impact de ce climat de guerre pour les Français. Même si beaucoup se revendiquent du slogan « Même pas Peur », en réalité la majorité de la population vit dans la crainte. Plus que l’insécurité, la précarité dans un monde du travail de plus en plus déshumanisant met la performance au premier plan en laissant de côté l’épanouissement personnel ou l’éthique. La peur de manquer comme l’incertitude face au lendemain sont ainsi exacerbées par le climat délétère de crise morale et sociale qu’envenime la menace d’attentats sur le territoire national.
La fascination de la violence avec pour corollaire le besoin de s’identifier à une cause pousse les laissés pour compte de la société dans l’engrenage infernal de l’embrigadement dans des mouvances terroristes, elles-mêmes organisées et financées par des États voyous : Arabie saoudite, Qatar ou Turquie avec la bénédiction des États-Unis.
L’UE, ce grand « machin » n’est qu’une illusion institutionnelle au service des argentiers et des multinationales. Le bateau Européen prend d’ailleurs l’eau, car de plus en plus d’États membres referment leurs frontières face à l’afflux des migrants. L’approximation dans l’appréciation de la crise humanitaire et l’improvisation des mesures pour sa gestion font le lit de l’extrémisme et du nationalisme. Le chèque en blanc de plusieurs milliards offert à la Turquie ou le projet de suppression des visas pour les ressortissants turcs dans l’espace Schengen, projet que soutient la chancelière Merkel, n’iront pas dans le sens d’un apaisement des tensions.
Le double jeu de la Turquie et sa prétention à recréer un espace ottoman au Proche et au Moyen-Orient ne semble inquiéter ni nos politiques ni nos « intellectuels », si prompts à dénoncer le « rêve soviétique » de Vladimir Poutine. La pensée européenne est bien en panne d’idées comme d’initiatives, sclérosée par son engluement dans la vision néo-conservatrice américaine, véritable dans pour les États-Unis et pour le Monde.
Le vote rejet pour des partis populistes ou le refuge dans l’abstention est le signe d’une dégradation des valeurs morales et d’une carence de projet politique national, européen ou international. La faiblesse de nos dirigeants se traduit par une posture de repli dans un état d’urgence, un climat de guerre civile, de division sociale, de sectarisme communautaire, d’abandon des principes humanistes qui ont présidé à l’émergence de l’esprit des Lumières.
Il me vient en tête cette chanson de Michel Sardou : Lénine, réveille-toi, ils sont devenus fous.
Nous n’avons pas besoin d’un nouveau Lénine, mais d’un réveil de la Conscience.