Aimer son pays…
Une leçon de patriotisme
Centenaire de la naissance de Romain Gary
David Cameron craint désormais que les rues de Londres deviennent le champ de bataille des djihadistes de l’EI. Contesté par l’épiscopat anglican au sujet de sa politique étrangère au Proche et au Moyen Orient, le Premier Ministre anglais mesurerait-il le risque d’un débordement de la peste islamiste en Europe, alors que le système communautariste britannique a montré ses signes de faiblesse ? La deuxième ville du pays, Birmingham n’est-elle déjà pas victime de l’islamisation agressive d’une partie de sa population, mettant à mal le schéma multiculturel, longtemps érigé en exemple de cohabitation démographique.
La contestation dès l’école des programmes scolaires par une minorité agissant au nom de la religion contient en elle les ferments d’un refus de vivre ensemble, en stigmatisant l’éducation qui devrait réveiller la curiosité et ouvrir les esprits vers la Connaissance. Le repli identitaire conduit une partie de la population à rejeter des modèles pour préserver son mode de vie et sa culture, mais au-delà ce même repli devient pour ces populations un moyen revendicatif d’imposer ses vues à l’ensemble de leurs voisins. La ghettoïsation de nombreux quartiers où l’autorité de l’État n’a plus aucune prise est hélas une réalité dont souffrent avant tout ceux qui aimeraient s’intégrer dans une société que condamne une minorité d’activistes sous couvert de la religion, mâtinée d’une victimisation érigée en principe.
On peut à la fois aimer le pays dans lequel on est né et celui de ses origines. La France est riche de ses particularismes régionaux, et pendant longtemps on restait attaché à son village ou sa région. L’exode rural a poussé nombre de populations à gagner les villes pour trouver un travail dans les usines. Et il aura fallu un ciment national pour fédérer toutes les différences. Le centralisme étatique a forgé le pays et son histoire, mais chacun conserve en soi son lien vers ses racines. Si Paris est devenu démographiquement une mosaïque de la France, avec les mouvements migratoires la France s’est constituée comme un patchwork multiculturel qui s’est enrichi des apports extérieurs. D’ailleurs, la mixité a jadis été le fait des princes plutôt que des peuples.
Des étrangers ont choisi un pays soit par amour soit pour y trouver la sécurité qu’ils n’avaient plus chez eux. Les crises économiques ont poussé et poussent encore des candidats à l’exode vers des terres pleines de promesses. Ces promesses-là ne pourront être malheureusement de moins en moins tenues tant les imbrications économiques sont ténues entre les pays les plus avancés et les plus pauvres.
Aimer son pays ne signifie en rien adhérer aveuglément aux décisions politiques de ses dirigeants. Les déviances sectaires d’un régime vers une dictature, même sous le masque de la démocratie, doivent être dénoncées par ceux pour qui l’éthique prime les intérêts. Les dérives des démocraties occidentales vers une confiscation des libertés individuelles au nom de la raison d’État qui n’est que la chasse gardée de quelques-uns doit nous laisser vigilants. La crise de 1929 et la désaffection de la classe politique allemande rendue coupable de l’humiliation du traité de Versailles a servi de ferment à la montée du nazisme, aidée si ce n’est soutenue par des élites comme les grands industriels allemands, mais pas uniquement. N’oublions l’attirance qu’exerça Adolf Hitler sur des personnalités comme Edouard VIII devenu Duc de Windsor, Charles Lindbergh (jusqu’en 1941), Thomas Edward Lawrence (plus connu sous le nom de Lawrence d’Arabie), Joseph Kennedy.
Hypnotisé par un leader exerçant sur les masses un pouvoir de fascination, Hitler entraîna le peuple allemand pourtant cultivé vers l’abîme. Et, si ce peuple sut se relever, ce ne fut que parce qu’il croyait en son destin tout en demeurant sous la tutelle des États-Unis qui assuraient sa protection.
Quand un peuple éduqué comme le peuple allemand a pu succomber à la tentation du sectarisme, peut-on condamner des peuples moins instruits d’être les complices des tyrans fanatisés d’ici ou d’ailleurs ?
Romain Gary avait bien fait la différence entre patriotisme et nationalisme : « Le patriotisme c'est l'amour des siens. Le nationalisme, c'est la haine des autres. »